LIS EN FRANÇAIS (ЧИТАЙ ПО-ФРАНЦУЗСКИ). Учебное пособие по самостоятельной работе для студентов филологического профиля - страница 2

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– Journaliste, un métier passionnant. Ils devaient en avoir des histoires à vous raconter lorsqu’ils revenaient.

– Croyez-vous? Mon père était reporter international. Toujours sur les lignes de front. Quand il rentrait, c’était pour se reposer. Il m’interdisait même d’allumer la radio. Ma mère, elle, tenait la rubrique de mode dans un magazine féminin de l’époque. Son journal s’intitulait Anne-Marie. Je me souviens seulement des couvertures avec ces visages et ces silhouettes de femmes tellement différentes de celles du village. Des élégantes qui paraissaient n’avoir ni maison, ni mari, ni enfants. On aurait dit qu’elles étaient faites en cire ou en porcelaine, comme ces poupées que ma mère me rapportait parfois de la ville. Si fines, si joliment habillées, si fragiles aussi! Ma grand-mère m’obligeait à les poser sur l’étagère du salon où je pouvais les regarder mais pas les toucher. Non, mes parents ne me parlaient pas de leur métier et d’ailleurs cela ne m’intéressait pas. Nous vivions dans des mondes étrangers. Moi au village, eux à la ville. La seule chose qui m’importait, c’était de serrer très fort, chaque soir, ma clé du bonheur. Ce secret-là, je ne le partageais avec personne. Pas même avec ma grand-mère. Vous qui écrivez des histoires, vous devriez raconter cela. Si vous avez le temps, je veux bien vous en parler.

Après avoir arrosé les fleurs de leurs tombes, les deux femmes reprennent le chemin du village, côte à côte. Peu à peu, une connivence s’installe, elles accordent leur démarche et leur respiration. La lenteur de la plus âgée apaise la tension que l’on perçoit dans les mouvements de la plus jeune. En retour, la vivacité de la cadette donne un élan à l’aînée dont la voix s’anime.

Elles arrivent bientôt à la maison de Roseline, à l’entrée du hameau. La vieille pousse la porte et s’efface devant sa compagne qui pénètre la première dans la cuisine. Dans la pièce aux volets clos règne une agréable fraîcheur. La pénombre les absorbe toutes les deux. Rosé-Marie ôte ses lunettes de soleil et s’éponge le nez avec un mouchoir en papier. Roseline sert une menthe à l’eau. Un sirop qu’elle fabrique avec les plantes du jardin. Elle dépose sur la toile cirée une boîte métallique remplie de biscuits secs. Une pâte croquante qu’il faut casser à petits coups de dents incisifs et qui laisse sur la langue une saveur d’amandes et de pignons.